La taille du romarin est un art subtil qui, bien que non strictement nécessaire à sa survie, est essentiel pour sculpter sa forme, maintenir sa vigueur et prolonger sa jeunesse. Cet acte de jardinage, loin d’être une simple mutilation, est un dialogue avec la plante, une manière de guider sa croissance pour en faire un arbuste non seulement plus esthétique, mais aussi plus productif et plus sain. Un romarin laissé à lui-même aura tendance à devenir un enchevêtrement de bois sec et dégarni à la base, surmonté de quelques touffes de verdure. Une taille régulière et bien pensée permet au contraire de conserver un port dense et compact, de stimuler la production de jeunes pousses tendres et aromatiques, et d’assurer le renouvellement constant de sa structure.
Le principe fondamental de la taille du romarin repose sur sa capacité limitée à produire de nouvelles pousses à partir du vieux bois. Contrairement à de nombreux autres arbustes, le romarin ne possède que très peu de bourgeons dormants sur ses branches anciennes et lignifiées. Tailler dans une zone où il n’y a plus de feuilles ou d’aiguilles se solde presque toujours par le dessèchement de la branche concernée. C’est la règle d’or à ne jamais oublier : il faut toujours tailler dans le « vert », c’est-à-dire au-dessus d’un départ de jeunes rameaux ou de feuilles.
La taille a plusieurs objectifs complémentaires. Le premier est esthétique : elle permet de maintenir une forme harmonieuse, que l’on souhaite un port en boule, en coussin ou une haie bien nette. Le deuxième objectif est de favoriser la ramification. En coupant l’extrémité d’une tige, on supprime le bourgeon terminal (dominance apicale), ce qui encourage les bourgeons latéraux situés en dessous à se développer. La plante devient ainsi plus touffue et plus dense.
Enfin, la taille est un acte de rajeunissement. Elle stimule l’émission de nouvelles pousses, qui sont les plus riches en huiles essentielles et donc les plus parfumées. C’est également sur ces jeunes rameaux que se développera la floraison de l’année suivante. En supprimant régulièrement les parties les plus anciennes et en favorisant la nouvelle croissance, on maintient la plante dans un état de jeunesse perpétuelle, ce qui augmente sa longévité et sa productivité. La taille est aussi l’occasion idéale pour récolter des branches pour la cuisine.
La meilleure période pour tailler
Le calendrier de la taille est crucial pour respecter le cycle de vie de la plante. La période la plus propice pour la taille principale, dite de formation ou d’entretien, se situe juste après la fin de la floraison principale, généralement entre la fin du printemps et le début de l’été (mai-juin). Tailler à ce moment précis présente plusieurs avantages. D’une part, on profite pleinement du spectacle de la floraison. D’autre part, la plante est en pleine période de croissance et cicatrisera très rapidement, produisant de nouvelles pousses vigoureuses.
Plus d'articles sur ce sujet
Ces nouvelles pousses issues de la taille de début d’été auront toute la saison chaude pour se développer et s’aoûter, c’est-à-dire se transformer en bois dur. Ce processus de lignification est essentiel pour qu’elles puissent résister aux premières gelées de l’hiver. Une taille effectuée trop tard en saison, à la fin de l’été ou en automne, stimulerait une croissance de jeunes pousses tendres qui n’auraient pas le temps de durcir avant le froid et qui gèleraient, affaiblissant ainsi l’ensemble de l’arbuste.
Une deuxième taille, beaucoup plus légère, peut être effectuée à la fin de l’été ou au début de l’automne, vers septembre. Elle consiste simplement à égaliser la forme de l’arbuste et à supprimer les quelques tiges qui auraient poussé de manière désordonnée après la première taille. Il s’agit plus d’un « nettoyage » que d’une véritable taille, en ne coupant que l’extrémité des rameaux. Il ne faut surtout pas faire de taille sévère à cette période.
Tout au long de l’année, il est possible et même conseillé d’effectuer de petites tailles de récolte. Prélever régulièrement des brins de romarin pour les besoins culinaires revient à effectuer une taille très légère et continue qui aide à maintenir la plante compacte. Il suffit de pincer ou de couper l’extrémité des jeunes pousses, ce qui encourage la ramification de la même manière qu’une taille plus formelle.
Les techniques de taille d’entretien
La taille d’entretien annuelle est la plus courante et la plus importante pour un romarin bien établi. Elle se pratique donc après la floraison, à l’aide d’un sécateur propre et bien aiguisé ou d’une cisaille pour les haies. L’objectif est de réduire le volume de la plante d’environ un tiers, voire de moitié pour les sujets très vigoureux. Il faut tailler toutes les tiges de manière uniforme pour conserver une belle silhouette arrondie ou en coussin.
Plus d'articles sur ce sujet
La technique consiste à couper les rameaux de l’année précédente, juste au-dessus du point de départ de la nouvelle croissance printanière. On peut facilement repérer cette zone par le changement de couleur et de texture de l’écorce. Il est essentiel, comme nous l’avons déjà souligné, de ne pas descendre plus bas dans le vieux bois dépourvu de feuillage. En cas de doute, il vaut mieux tailler moins court que trop court. Le but est de rafraîchir la chevelure de la plante sans toucher à sa charpente.
Pour les romarins rampants, la taille vise à limiter leur expansion et à densifier leur tapis. On peut raccourcir les longues tiges qui s’éloignent trop du cœur de la plante et tailler légèrement l’ensemble de la touffe pour favoriser de nouvelles pousses. Cela évite que le centre de la plante ne se dégarnisse avec le temps. La taille peut aussi être l’occasion de supprimer les branches qui touchent le sol et qui pourraient s’enraciner si on ne souhaite pas de marcottage naturel.
En plus de cette taille de mise en forme, un nettoyage régulier est bénéfique. Il faut inspecter la plante et supprimer toutes les branches mortes, sèches ou malades que l’on peut trouver. Ces branches inutiles encombrent le cœur de l’arbuste, gênent la circulation de l’air et peuvent être des portes d’entrée pour les maladies. Ce nettoyage peut se faire à n’importe quel moment de l’année.
Le rabattage et la taille de rajeunissement
Avec le temps, un romarin qui n’a pas été taillé régulièrement peut devenir très grand, avec une base complètement ligneuse et dégarnie et seulement quelques feuilles aux extrémités. Dans ce cas, une simple taille d’entretien n’est plus suffisante et une taille de rajeunissement, plus drastique, peut être tentée pour essayer de reformer la plante. C’est une opération risquée qui doit être menée avec prudence, car le romarin supporte mal les tailles sévères.
La meilleure méthode pour rajeunir un vieux romarin est de procéder de manière progressive, en étalant la taille sur deux ou trois ans. Chaque année, au début du printemps, on sélectionne environ un tiers des plus vieilles branches et on les rabat sévèrement. Il faut chercher un point de coupe le plus bas possible sur la branche, mais impérativement juste au-dessus d’un départ de quelques petites pousses ou feuilles. S’il n’y a absolument aucune feuille sur la partie basse de la branche, il est très risqué de la couper.
Cette méthode progressive permet de stimuler la croissance de nouvelles pousses à partir de la base de la plante sans la priver de tout son feuillage d’un seul coup. La première année, on supprime un premier tiers des vieilles branches. La deuxième année, on s’attaque à un autre tiers, et ainsi de suite, jusqu’à ce que toute la charpente de l’arbuste ait été renouvelée. Au bout de trois ans, on devrait avoir un romarin plus compact et rajeuni.
Si un romarin est vraiment trop vieux et déformé, et que la taille de rajeunissement semble trop risquée ou compliquée, il est parfois plus simple et plus sage de le remplacer. Le romarin est une plante facile à multiplier par bouturage. Il est donc aisé de prélever quelques boutures sur le vieux sujet avant de l’arracher, afin de le pérenniser en donnant naissance à de nouveaux plants vigoureux et prêts à être formés correctement dès leur plus jeune âge.
La taille de formation des jeunes plants
La formation d’un jeune romarin commence dès la première année après sa plantation ou son bouturage. Une taille précoce est la meilleure façon de lui donner une structure de base solide et dense et d’éviter qu’il ne se dégarnisse rapidement. Lorsque les jeunes tiges atteignent une quinzaine de centimètres, il ne faut pas hésiter à pincer ou à couper leur extrémité sur quelques centimètres. Cette simple action va les forcer à se ramifier et à produire deux nouvelles tiges au lieu d’une seule.
Cette opération de pincement peut être répétée plusieurs fois au cours de la première saison de croissance. L’objectif est de construire une charpente bien ramifiée dès la base. Il vaut mieux sacrifier la première floraison, souvent modeste, au profit de l’établissement d’une bonne structure. Un jeune plant bien formé dès le départ sera beaucoup plus facile à entretenir par la suite et conservera un port compact beaucoup plus longtemps.
Si l’on souhaite former le romarin sur une seule tige, à la manière d’un petit arbre miniature, la technique est différente. Il faut sélectionner la tige la plus droite et la plus vigoureuse et la tuteurer. On supprime ensuite progressivement toutes les pousses latérales qui se développent le long de cette tige principale, jusqu’à la hauteur souhaitée pour la couronne. Une fois cette hauteur atteinte, on pince la tête de la tige principale pour encourager la ramification et la formation d’une boule de feuillage au sommet.
Pour la création d’une haie basse, les jeunes plants de romarin doivent être plantés assez près les uns des autres (environ 40-50 cm). Dès la première année, il faut les tailler régulièrement avec une cisaille pour les maintenir à la même hauteur et favoriser leur densification. Cette taille répétée encouragera les plants à se rejoindre pour former une bordure continue et bien fournie. La patience et la régularité sont les clés pour obtenir une belle haie de romarin.
