La belle-de-nuit, avec ses origines tropicales, est une plante gélive, ce qui signifie qu’elle ne supporte pas les températures négatives prolongées. Assurer son hivernage est donc une étape absolument cruciale pour pouvoir la conserver d’une année sur l’autre dans la plupart des climats tempérés. Cette opération, qui consiste à protéger ses précieuses racines tubéreuses du gel, peut sembler intimidante au premier abord, mais elle est en réalité assez simple et très gratifiante. En prenant quelques précautions à l’automne, tu t’assures de retrouver tes magnifiques plants au printemps suivant, souvent plus vigoureux et plus florifères encore.
La nécessité d’arracher les tubercules pour l’hiver dépend entièrement de ton climat local. Dans les régions méditerranéennes ou océaniques où les hivers sont doux et les gelées rares et légères (-5°C au maximum), il est parfois possible de laisser les tubercules en pleine terre. Dans ce cas, une protection est tout de même indispensable. Il faudra recouvrir la souche d’une épaisse couche de paillis protecteur, comme des feuilles mortes, de la paille ou du compost, sur au moins 15 à 20 centimètres d’épaisseur pour isoler les racines du froid.
Cependant, pour la grande majorité des jardiniers vivant dans des régions où les hivers sont plus rigoureux, avec des gelées fréquentes et des températures descendant régulièrement en dessous de -5°C, l’arrachage et le stockage des tubercules sont impératifs. Tenter de les laisser en terre dans ces conditions se solderait presque inévitablement par leur pourrissement et leur mort. L’hivernage à l’abri est la seule méthode fiable pour garantir leur survie.
Le signal pour commencer les préparatifs de l’hivernage est donné par la plante elle-même et la météo. Attends les premières petites gelées d’automne. Celles-ci vont faire noircir et geler le feuillage de la belle-de-nuit, ce qui est un signe naturel que la partie aérienne de la plante a terminé son cycle annuel. C’est à ce moment précis que la plante entre en dormance et qu’il est temps d’intervenir pour mettre ses tubercules à l’abri pour la saison froide.
L’hivernage ne concerne pas seulement la protection contre le gel, mais aussi contre l’humidité excessive. Un tubercule en dormance est très sensible à la pourriture s’il est conservé dans un environnement trop humide. Que ce soit en pleine terre sous un paillis ou en caisse dans une cave, le contrôle de l’humidité est un facteur clé de la réussite de l’hivernage. Un bon drainage pour les plantes laissées en terre et un substrat de stockage sec pour les tubercules arrachés sont donc essentiels.
La préparation et l’arrachage des tubercules
Le processus d’hivernage commence juste après que les premières gelées ont anéanti le feuillage. La première étape consiste à tailler les tiges. À l’aide d’un sécateur propre, coupe toutes les tiges à environ 5 à 10 centimètres au-dessus du niveau du sol. Cela facilite grandement la manipulation de la souche et permet de concentrer toute l’énergie restante dans les tubercules. Laisse les collets en place pour pouvoir repérer facilement où se trouve la souche à déterrer.
Ensuite, procède à l’arrachage proprement dit. Munis-toi d’une fourche-bêche, qui est l’outil le plus adapté car elle permet de soulever la motte de terre sans trancher les tubercules, contrairement à une bêche classique. Plante la fourche dans le sol à une distance respectable du centre de la plante (environ 20-30 cm) pour ne pas endommager les racines charnues. Fais levier doucement tout autour de la souche pour ameublir la terre et extraire la motte entière.
Une fois la souche hors de terre, manipule-la avec précaution. Secoue-la délicatement pour faire tomber le plus gros de la terre qui adhère aux tubercules. Il n’est pas nécessaire, ni même conseillé, de les laver à grande eau. Un peu de terre sèche qui reste sur les tubercules peut même offrir une protection supplémentaire pendant le stockage. Un nettoyage excessif et l’humidité pourraient favoriser l’apparition de moisissures.
Après ce premier nettoyage, il est crucial de laisser les tubercules sécher pendant quelques jours. C’est l’étape du ressuyage. Place-les dans un endroit sec, aéré et à l’abri du soleil direct, comme un garage, un abri de jardin ou sous un auvent. Cette période de séchage permet à la peau des tubercules de se raffermir et aux éventuelles petites blessures causées lors de l’arrachage de cicatriser. Cette cicatrisation est essentielle pour prévenir l’entrée de maladies pendant les longs mois de stockage.
Les conditions de stockage optimales
Le choix du lieu de stockage est déterminant pour la réussite de l’hivernage. L’endroit idéal doit être sombre, frais, hors gel et bien ventilé. Une bonne cave, un cellier, un garage non chauffé ou même un grenier isolé sont des options parfaites. La température de stockage idéale se situe entre 5 et 10°C. Des températures plus élevées pourraient inciter les tubercules à germer prématurément, tandis que des températures inférieures à 0°C leur seraient fatales.
Le contenant utilisé pour le stockage est également important. Une caisse en bois, une cagette, une boîte en carton ou même un grand pot en terre cuite feront l’affaire. L’essentiel est que le contenant permette une bonne circulation de l’air. Évite les contenants en plastique hermétiques qui piègent l’humidité et favorisent la pourriture. Tu peux percer des trous supplémentaires dans une boîte en carton si nécessaire pour améliorer l’aération.
Remplis le fond de ton contenant d’une couche de matériau de stockage sec et inerte. Le sable de rivière sec, la tourbe blonde, la vermiculite, la perlite ou même des copeaux de bois sont d’excellents choix. Ce matériau servira à isoler les tubercules les uns des autres, à maintenir une humidité ambiante stable et à absorber tout excès d’humidité. Place une première couche de tubercules sur ce lit, en veillant à ce qu’ils ne se touchent pas.
Recouvre ensuite complètement les tubercules avec le même matériau de stockage, puis ajoute une autre couche de tubercules si nécessaire, et ainsi de suite, en terminant par une couche de matériau isolant. N’oublie pas d’étiqueter ton contenant avec le nom de la plante et éventuellement la couleur des fleurs si tu as plusieurs variétés. Cela te sera très utile au printemps au moment de la replantation.
La surveillance durant l’hiver
Le stockage des tubercules ne s’arrête pas une fois qu’ils sont mis en caisse. Un suivi régulier tout au long de l’hiver est nécessaire pour s’assurer que tout se passe bien. Il est conseillé de jeter un œil à tes tubercules au moins une fois par mois. Cette inspection te permettra de détecter rapidement tout problème de pourriture ou de dessèchement et d’y remédier avant qu’il ne se propage à l’ensemble de ton stock.
Lors de tes inspections, vérifie l’état général des tubercules. Palpe-les délicatement. Ils doivent rester fermes. Si tu trouves un tubercule qui est devenu mou, qui présente des taches de moisissure ou qui dégage une mauvaise odeur, retire-le immédiatement et jette-le pour éviter qu’il ne contamine ses voisins. Une seule racine pourrie peut ruiner toute une caisse si elle n’est pas enlevée à temps.
Surveille également le niveau d’humidité du substrat de stockage. Si tu constates que les tubercules commencent à se rider et à se dessécher excessivement, c’est que l’atmosphère est trop sèche. Tu peux y remédier en vaporisant très légèrement un peu d’eau sur le substrat de stockage, mais jamais directement sur les tubercules. Fais cela avec une extrême parcimonie, car l’excès d’humidité est bien plus dangereux que la sécheresse.
À l’inverse, si tu remarques de la condensation ou de la moisissure à la surface du substrat, c’est que l’endroit est trop humide ou pas assez aéré. Dans ce cas, ouvre la caisse et laisse-la s’aérer dans un lieu sec pendant quelques jours. Tu peux aussi remplacer le substrat de stockage s’il te semble trop humide. Une bonne ventilation du local de stockage est la meilleure prévention contre ce type de problème.
La préparation pour la replantation au printemps
Vers la fin de l’hiver, généralement en mars ou début avril, il est temps de commencer à penser à la sortie d’hivernage. C’est le moment de faire un dernier bilan de tes tubercules stockés. Sors-les délicatement de leur caisse et inspecte-les un par un. Élimine tous ceux qui n’ont pas survécu à l’hiver (ceux qui sont pourris, complètement desséchés ou vides). Ne conserve que les tubercules qui sont restés fermes et sains.
Si les tubercules semblent un peu déshydratés, tu peux les réhydrater en les plaçant dans un bac de terreau légèrement humide pendant une à deux semaines avant la plantation. Cela leur permettra de se regonfler et de préparer leurs bourgeons à la croissance. C’est aussi à ce moment que tu peux procéder à la division des souches les plus grosses si tu souhaites multiplier tes plants. Sépare les tubercules avec un couteau propre, en t’assurant que chaque nouvel éclat possède au moins un bourgeon visible.
Tu peux également « démarrer » tes tubercules à l’intérieur pour gagner quelques semaines de culture et obtenir une floraison plus précoce. Pour ce faire, plante chaque tubercule dans un pot individuel rempli de bon terreau, en le recouvrant à peine. Place les pots dans un endroit chaud et lumineux, et maintiens le terreau légèrement humide. Les premières pousses ne tarderont pas à apparaître.
La plantation définitive en pleine terre ne doit se faire qu’une fois que tout risque de gelée est définitivement écarté dans ta région, généralement après les saints de glace à la mi-mai. Que tes tubercules aient été démarrés en pot ou non, le processus de plantation est le même. Creuse un trou, amende le sol avec du compost, place ton tubercule ou ta jeune pousse, recouvre de terre, tasse légèrement et arrose généreusement. Tu seras alors prêt pour une nouvelle saison de floraison magique.
📷 そらみみ, CC BY-SA 4.0, via Wikimedia Commons