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L’hivernage du cognassier

Daria · 28.06.2025.

La préparation du cognassier pour l’hiver est une étape cruciale de son cycle annuel, souvent sous-estimée mais pourtant essentielle pour garantir non seulement sa survie durant la saison froide, mais aussi sa vigueur et sa productivité pour l’année suivante. Bien que le cognassier soit un arbre fruitier rustique, capable de supporter des températures négatives importantes une fois adulte, les jeunes sujets et certaines conditions particulières nécessitent une attention et une protection accrues. L’hivernage ne consiste pas seulement à protéger l’arbre du gel, mais aussi à le nettoyer, à le soigner et à le préparer à entrer en dormance dans les meilleures conditions possibles. C’est le dernier acte de soin de la saison, qui prépare le premier acte du printemps à venir.

La période de dormance hivernale est une phase de repos végétatif pour l’arbre. Le métabolisme ralentit, la sève ne circule presque plus et l’arbre vit sur les réserves qu’il a accumulées durant la belle saison. Un hivernage réussi commence donc dès la fin de l’été et l’automne. Un arbre qui a été correctement arrosé et nourri après la récolte, et qui n’est pas affaibli par des maladies ou des ravageurs, entrera dans l’hiver avec des réserves suffisantes pour bien résister au froid. Négliger l’arbre après la récolte est une erreur qui peut se payer au printemps suivant.

La protection contre le froid est l’aspect le plus évident de l’hivernage, surtout pour les jeunes arbres dont l’écorce est encore tendre et le système racinaire peu profond. Le gel peut causer des fissures dans l’écorce (gélivures), endommager les racines superficielles et, plus tard en saison, détruire les bourgeons floraux lors des gelées printanières tardives. Des mesures de protection simples mais efficaces permettent de limiter ces risques et d’assurer un passage sans encombre de la saison froide.

Enfin, l’hiver est aussi une période propice à certaines interventions sanitaires. L’absence de feuilles rend l’inspection de la structure de l’arbre beaucoup plus facile. C’est le moment idéal pour repérer le bois mort ou malade, les cocons d’insectes ou les chancres sur les branches. C’est également la saison des traitements d’hiver, qui visent à éliminer les formes hivernantes de nombreux parasites et maladies, réduisant ainsi la pression infectieuse pour le printemps. Un bon hivernage est donc un ensemble de gestes préventifs qui conditionnent la santé future de ton cognassier.

Préparation de l’arbre avant les premiers froids

Dès la fin de l’automne, après la chute de toutes les feuilles, un grand nettoyage s’impose au pied de ton cognassier. Il est impératif de ramasser méticuleusement toutes les feuilles mortes, ainsi que les fruits tombés au sol ou restés momifiés sur les branches. Ces débris organiques sont des refuges de choix pour les spores de champignons responsables de maladies comme l’entomosporiose ou la moniliose, ainsi que pour les œufs et les pupes de certains insectes ravageurs. En les éliminant et en les brûlant ou en les jetant à la déchetterie (ne les mets pas au compost), tu réduis considérablement le potentiel d’infection pour la saison suivante.

Une fois le sol propre, un léger griffage en surface peut être bénéfique pour aérer la terre et exposer au froid d’éventuelles larves ou pupes de ravageurs qui s’y seraient enfouies pour l’hiver. C’est aussi le moment idéal pour faire un dernier apport d’amendement organique. Une couche de compost bien mûr ou de fumier décomposé étalée sous la couronne de l’arbre agira comme une couverture protectrice pour les racines tout en enrichissant le sol. Les pluies d’hiver aideront les nutriments à s’infiltrer lentement dans la terre, où ils seront disponibles pour l’arbre à son réveil au printemps.

Inspecte attentivement le tronc et les branches de l’arbre maintenant qu’ils sont nus. Recherche toute trace de maladie, comme des chancres (plaies boursouflées sur l’écorce) ou des écoulements de gomme. Gratte délicatement les mousses et les lichens qui peuvent se développer sur le tronc avec une brosse dure (mais pas métallique pour ne pas blesser l’écorce). Bien qu’ils ne soient pas directement pathogènes, ils peuvent abriter des larves d’insectes et des spores de maladies. Cette inspection te permet de faire un bilan de santé de l’arbre avant son entrée en dormance.

Enfin, juste avant l’arrivée des premières fortes gelées, et si l’automne a été sec, procède à un dernier arrosage copieux. Un sol bien hydraté (mais non détrempé) protège mieux les racines du gel qu’un sol sec. L’eau contenue dans le sol libère de la chaleur en gelant, ce qui peut tempérer légèrement la baisse de température au niveau des racines. Cet arrosage permet à l’arbre d’entrer en hiver avec ses réserves en eau au maximum, ce qui l’aidera à mieux résister au dessèchement causé par le vent glacial.

Protection du tronc et des racines

La protection du tronc est particulièrement importante pour les jeunes cognassiers (jusqu’à 3-4 ans). Leur écorce fine et fragile est sensible aux grands écarts de température entre le jour et la nuit en hiver. Sous l’effet du soleil hivernal, le côté sud-ouest du tronc peut s’échauffer fortement, puis subir un refroidissement brutal à la nuit tombée, ce qui peut provoquer des fissures longitudinales dans l’écorce, appelées gélivures. Ces plaies sont des portes d’entrée pour les maladies. Pour éviter cela, il existe plusieurs solutions de protection.

La méthode la plus traditionnelle et efficace est le badigeonnage du tronc avec un blanc arboricole ou un chaulage. Ce mélange, à base de chaux ou d’argile, forme une couche blanche qui réfléchit les rayons du soleil, évitant ainsi l’échauffement excessif du tronc et les chocs thermiques. L’application se fait à l’aide d’un large pinceau, en recouvrant le tronc depuis la base jusqu’au départ des premières branches charpentières. En plus de leur effet protecteur contre le gel, ces badigeons ont une action insecticide et fongicide, détruisant de nombreuses larves et spores nichées dans les anfractuosités de l’écorce.

Une autre option consiste à envelopper le tronc avec des matériaux isolants. Tu peux utiliser des manchons de protection en plastique, en jute ou en roseau, que l’on trouve dans le commerce. Le paillasson ou la toile de jute enroulée en plusieurs épaisseurs autour du tronc est également une très bonne solution. Ces protections doivent être installées à la fin de l’automne et retirées au début du printemps pour éviter que l’humidité ne s’accumule sous la protection et ne favorise le développement de maladies. Cette protection est aussi très efficace contre les rongeurs (lapins, campagnols) qui peuvent ronger l’écorce des jeunes arbres en hiver lorsque la nourriture se fait rare.

Pour protéger les racines du gel, surtout dans les régions aux hivers très rigoureux ou pour les arbres plantés en pot, le paillage est la meilleure solution. Après le nettoyage automnal, étale une couche épaisse (15 à 20 cm) de paillis organique au pied de l’arbre, sur toute la surface de la couronne. Les feuilles mortes (saines), la paille, les frondes de fougères ou le BRF (Bois Raméal Fragmenté) sont d’excellents isolants. Ce manteau protecteur maintiendra une température plus clémente au niveau du sol, protégeant les racines les plus superficielles du gel et du dessèchement.

Soins durant la période de dormance

Même si le cognassier est en dormance, il ne faut pas l’oublier complètement pendant l’hiver. Cette saison est en fait le moment idéal pour effectuer la taille de structure et d’entretien. L’absence de feuilles offre une visibilité parfaite sur l’architecture de l’arbre, ce qui permet de mieux juger quelles branches supprimer pour aérer la ramure, éliminer le bois mort ou malade, et donner à l’arbre une forme équilibrée. La taille doit être pratiquée par temps sec et hors période de fortes gelées, généralement entre janvier et mars.

Pendant l’hiver, il est également possible d’appliquer des traitements préventifs qui auront une grande efficacité. Une fois l’arbre taillé et les plaies de taille protégées avec un mastic cicatrisant, une pulvérisation d’huile horticole (huile blanche) peut être réalisée. Cette huile agit par asphyxie sur les formes hivernantes de nombreux ravageurs, comme les œufs de pucerons ou de carpocapse et les cochenilles, nichés dans les replis de l’écorce. Ce traitement, respectueux de l’environnement, permet de réduire considérablement la population de ravageurs au démarrage de la saison.

Après ce traitement huileux, et avant le gonflement des bourgeons (débourrement), une pulvérisation de bouillie bordelaise (un fongicide à base de cuivre) est recommandée. Ce traitement d’hiver vise à éliminer les spores de champignons qui hibernent sur l’écorce et les bourgeons, prévenant ainsi le développement de maladies comme l’entomosporiose au printemps. Ces deux traitements d’hiver (huile puis cuivre, à quelques semaines d’intervalle) constituent une base sanitaire très solide pour bien démarrer la nouvelle saison de croissance.

Il faut également rester vigilant face aux conditions météorologiques extrêmes. Après de fortes chutes de neige, il peut être judicieux de secouer doucement les branches pour faire tomber l’excès de neige. Le poids de la neige lourde et humide peut en effet provoquer la cassure de certaines branches, surtout si elles sont fragiles ou mal orientées. De même, en cas de sécheresse hivernale prolongée, un arrosage peut être nécessaire si le sol n’est pas gelé en profondeur.

Gestion des risques liés au gel tardif

Le risque le plus important à la sortie de l’hiver est celui des gelées tardives printanières. Le cognassier est un arbre qui débourre et fleurit relativement tard, ce qui le protège souvent des gelées les plus précoces, mais il n’est pas à l’abri d’un coup de froid tardif en avril ou en mai. Les jeunes bourgeons, les fleurs épanouies et les très jeunes fruits sont extrêmement sensibles au gel. Une seule nuit avec des températures descendant en dessous de -2°C peut suffire à anéantir la totalité de la récolte de l’année.

La première stratégie de prévention consiste, dès la plantation, à choisir un emplacement judicieux pour l’arbre. Il faut éviter les bas-fonds et les cuvettes où l’air froid, plus dense, a tendance à stagner. Préfère les situations légèrement en pente ou sur un plateau, qui permettent à l’air froid de s’écouler. Une exposition à l’est peut aussi être risquée, car le soleil levant dégèle trop brutalement les bourgeons, ce qui provoque l’éclatement des cellules végétales. Une exposition à l’ouest ou au sud est souvent plus sûre.

Si une gelée est annoncée et que ton cognassier est encore de taille modeste, tu peux le protéger en le couvrant avec un ou plusieurs voiles d’hivernage. Il faut draper le voile sur l’ensemble de la ramure la veille au soir, en le faisant descendre jusqu’au sol pour emprisonner la chaleur qui remonte de la terre. Pense à retirer le voile le matin dès que les températures redeviennent positives pour permettre à la lumière de passer et aux insectes pollinisateurs de faire leur travail. Cette méthode est très efficace pour les jeunes arbres.

Pour les arbres plus grands, la protection est plus compliquée. L’aspersion d’eau est une technique utilisée par les professionnels : en gelant sur les bourgeons, l’eau libère des calories et maintient la température des tissus végétaux à 0°C, ce qui les protège des températures plus basses. Cette technique est cependant difficile à mettre en œuvre pour un amateur et consomme beaucoup d’eau. Une autre astuce, pour de petites gelées blanches, consiste à créer un léger courant d’air près de l’arbre (avec un ventilateur) pour empêcher le dépôt de givre, mais son efficacité est limitée. La meilleure protection reste une bonne situation et un peu de chance avec la météo.

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